JUILLARD LE COZ Geneviève - 1945 L

JUILLARD (Geneviève), épouse LE COZ, née le 23 décembre 1925 à Saint- Rambert l’Île-Barbe (Rhône), décédée le 8 décembre 2021 à Grenoble (Isère). – Promotion de 1945 L.


Elle était la quatrième fille d’une famille qui en comptait cinq . Le père, resté dans l’armée après la Grande Guerre, changeait souvent de résidence ; il mourut en 1929 à la suite d’une maladie des reins due aux gaz inhalés durant le conflit, laissant son épouse et leurs filles âgées de 2 à 8 ans . Geneviève restera marquée par le départ prématuré de ce père .

La famille s’installa alors à Grenoble près des grands- parents paternels ; Geneviève grandit, entourée de l’amour de sa mère et de sa grand-mère maternelle venue soutenir ses

petites-filles . Elle est pupille de la Nation et fait ses études au lycée Stendhal, alors que les filles de famille catholique étaient plutôt inscrites dans le privé . Comme son père, elle joue du violon : elle a l’oreille absolue .

Après une hypokhâgne et une khâgne à Lyon, et en l’absence du concours féminin en 1944, elle refait une khâgne à Paris (au lycée Fénelon) et entre à « Sèvres » l’année suivante ; elle a toujours raconté qu’elle devait son admission au fait d’être arrivée ex-aequo avec la première recalée qui en était à son troisième concours, une Toulousaine .

Le jury de 1945 obtint du ministère deux places supplémentaires au concours : en conséquence Geneviève put intégrer les nouveaux locaux du boulevard Jourdan .

Agrégée de grammaire, elle est nommée au lycée Paul-Cézanne d’Aix-en- Provence, ville qu’elle découvre et qui la rapproche de ses origines provençales du côté maternel . Elle noue de solides amitiés avec des collègues . De retour à Grenoble après une pleurésie mal soignée à Aix qui manque de l’emporter et l’éloigne plus d’un an de l’enseignement, elle enseigne au collège Stendhal où elle avait fait ses études . Elle laissera un souvenir vivace à ses élèves de par son humanité .

En 1960, elle se marie avec Henri Le Coz, professeur de physique à Paris . Elle le suit dans la capitale et est nommée au lycée d’Orsay . De leur union naissent trois filles . En 1970, Henri a l’opportunité d’une nomination en classes préparatoires au lycée Champollion de Grenoble : Geneviève le rejoint et est nommée l’année suivante au collège Fantin-Latour où elle terminera sa carrière en 1978 .

Elle garde un très bon souvenir de son enseignement dans un quartier plutôt populaire à cette époque . Elle fait découvrir la poésie d’Aragon à ses élèves par les chansons de Jean Ferrat, et organise des sorties à l’extérieur de l’établissement, ce qui ne se pratiquait pas beaucoup alors .

Geneviève met alors à profit sa retraite pour apprendre des langues qu’elle affec- tionne particulièrement et dans lesquelles elle a des facilités : le grec moderne et l’hébreu . Parallèlement, elle suit des cours bibliques et elle lit beaucoup, tout en aidant gracieusement des élèves ayant des difficultés en français et en latin . Elle lit aussi des livres en italien, langue qu’elle avait étudiée seule lors de sa pleurésie, dans ses jeunes années de professorat, en tâtonnant consciencieusement mot après mot .

Elle continue à enseigner au sein de la paroisse universitaire (qui regroupe les professeurs chrétiens de l’enseignement public) avec Henri Le Coz ; c’est d’ailleurs au cours d’une session de cette paroisse qu’ils s’étaient rencontrés . Dans sa propre paroisse, elle accompagne les familles en deuil ; elle anime l’Acat (Association des chrétiens pour l’abolition de la torture) . Elle et Henri s’intéressent aux problèmes des migrants : ils accueillent deux demandeurs d’asile chez eux . Ils militent au PSU (le Parti socialiste unifié de Michel Rocard) puis au PS après 1974 : elle corrige les tracts et ils participent aux réunions .

Geneviève s’occupe aussi de sa mère âgée et d’une de ses sœurs handicapées ; ensemble elles font les mots croisés du Monde et des parties de scrabble – qu’elle gagne toujours . La maison est toujours ouverte : à l’écoute des autres, elle aime beau- coup les jeunes et accueille nos amis dans la simplicité . Elle s’occupe aussi de ses petits-enfants . Généreuse, elle s’intéresse au monde qui l’entoure et à l’actualité .

Elle reste ainsi vaillante jusqu’à près de 90 ans ; puis une chute et une hospitali- sation accentuent ses troubles cognitifs . Peu à peu sa santé se dégrade, sans qu’elle perde son sourire et sa gentillesse, ne se plaignant que rarement . À la fin, elle confond ses filles avec ses sœurs et ses auxiliaires de vie avec ses filles . Jusqu’au bout, elle contemplera les montagnes et la nature qu’elle aimait tant arpenter et regarder . Elle a eu la chance de s’éteindre chez elle ; deux semaines plus tard, son mari l’a rejointe après soixante et un ans de vie commune .

Élisabeth, Anne et Catherine LE COZ, ses filles